D’aussi longtemps que je me souvienne j’ai toujours été fasciné et attiré par les bateaux, les ports, la mer... Tout petit déjà, je rêvais sur les pontons, dans la voiture, installé derrière mon père lorsque nous doublions des voitures qui tractaient des bateaux... Je m’imaginais tour à tour navigateur, pirate, vieux loup de mer. Mes lectures y sont sans aucun doute pour quelque chose : J. London, J. Verne, H. Melville, H. de Monfreid...
A cette époque où l’on construit ses rêves, tout semble à la fois possible et inaccessible. La vie est ainsi faite même si une petite voix nous susurre une attirante mélodie : n'ayez jamais peur de la vie, n'ayez jamais peur de l'aventure, faites confiance au hasard, à la chance, à la destinée. Partez, allez conquérir d'autres espaces, d'autres espérances. Le reste vous sera donné de surcroît...
Le temps passe, les rêves demeurent... C’était l'été. Des vacances tous les quatre en Vendée. Un temps idéal. Les séances de bronzage alternaient les plages de lecture. De longues promenades au bord de la mer. Les vagues léchaient délicatement nos pieds de parisiens un peu pâles... Du repos. Une sympathique mélodie du bien-être. Et puis un jour, à quelques mètres de ma serviette, je le vois. Une coque superbement repeinte (bleu marine), des voiles en coton un peu vintage... Je m'approche du dériveur et discute avec le propriétaire sensiblement de mon âge (aujourd'hui...). Il me présente, avec des étoiles dans les yeux, le Vaurien de son enfance. Il partage de bonne grâce de nombreuses informations utiles. Intarissable. Puis, désireux de profiter des derniers rayons du soleil déclinant, il grée son bateau et s'éloigne de la plage en tirant un bord tout en douceur. Alors resurgissent du passé des souvenirs enfouis au fond de moi-même depuis de nombreuses années, faute d'équipier au pied marin... Les premiers plans au 1/10ème achetés dans la revue MRB, ma première construction à l'échelle, mon premier mini-chantier naval, mes premiers rêves de navigateur...
Quelques années (sic) ont passé, le temps a fait son oeuvre, ma vie n'est plus la même... mais ceci est une autre histoire. Ce qui importe c'est le présent. Tout a commencé il y a quelques années, grâce à ma nouvelle équipière d'épouse, par la pratique estivale du catamaran. Encouragé par mon maour, je me suis remis à rêver. Après quelques balbutiements quant à la meilleure approche, la réponse s'est imposée, un beau matin de prise de quart, presque naturellement. Le projet est devenu évident : posséder mon propre Vaurien et vivre ce (vieux) rêve d’enfant ! Petit à petit mon projet s'est affiné et puis un jour, après quelques mois de recherche et de tâtonnements, une annonce a retenu mon attention. Un Spair Marine de 1969 qui semblait être en bon état. Contact pris avec le vendeur, également passionné, nombreuses questions, nombreuses réponses, nombreux échanges de photos... pour finalement décider d'un terrain d'entente et parvenir à un accord. Je n'y croyais pas réellement moi-même... J'allais acquérir mon premier bateau !
Remorque attelée, direction le Pas-de-Calais. Une fois sur place, découverte du bateau, validation des points techniques, discussion avec le vendeur qui nous raconte l'histoire du bateau (pris en photo et imprimé sur une carte postale à une époque que les moins de vingt ans...), installation du bateau sur la remorque, vérification des attaches et des noeuds et retour vers la région parisienne après un déjeuner rapide dans la famille, premiers admirateurs du bateau... Après une émotion très forte au moment des premiers tours de roues et quelques heures d’un trajet sans la moindre difficulté, nous sommes arrivés au port d'attache du Vaurien sur la base de loisirs de Saint Quentin en Yvelines. Juste le temps d'immortaliser cet instant dans le soleil couchant sur le plan d'eau... Ces années Vaurien ont été une pure merveille de découverte, d’apprentissage, de partage, d’humilité, de respect, d’entraide... et une confirmation sans la moindre équivoque : j’aime les bateaux, j’aime naviguer, j’aime la mer...
Puis, comme tous les marins, mes envies m’ont entraîné vers des horizons plus larges... bien sûr le Vaurien, les catamarans de sport procurent de superbes sensations, mais... naviguer sur la mer avec un plus grand bateau, cela ressemble à quoi ? C’est ainsi que nous avons commencé à nous renseigner (louer un bateau plus grand, se perfectionner avec un skipper professionnel...) en sillonnant une région chère au cœur de mon épouse et, dorénavant également au mien, la Manche. Nos envies nous ont conduit jusqu’à Granville, renouant avec de nombreux souvenirs, où nous avons rencontré Jérôme, un loueur de bateau. Dire que le contact s’est bien passé serait très en-deçà de la réalité tellement notre rencontre a été à la fois simple et naturelle. Grâce à ses conseils, son accompagnement, sa disponibilité et son naturel, nous avons pu découvrir la navigation habitable sur un navire de 35 pieds ! Un Océanis 350 de Bénéteau. Nous avons procédé et progressé avec ordre et méthode en apprenant, écoutant, expérimentant, vérifiant, analysant... jusqu’à ce que, courant de l’année 2018 nous soyons suffisamment prêts pour notre première navigation à deux, seuls à bord ! Cap sur Cancale et prise de coffre à Port-Mer !
Cette expérience a été un véritable choc émotionnel et une révélation ! J’étais en train de réaliser un rêve d’enfant !
Et puis soudain, en décembre 2019, tout bascule. Alexandra et moi arpentons les allées du Nautic de Paris et nous nous dirigeons vers le stand de Jérôme afin de récupérer les tarifs 2020. Lors de notre échange, ce dernier nous apprend que nous ne naviguerons probablement plus sur le bateau que nous louons d’habitude car il envisage de le vendre. Il nous présente en revanche un autre bateau de sa flotte qui correspondrait pleinement à notre programme de navigation.
Nous nous éloignons du stand un peu dépités tout de même car nous aimons bien ce bateau qui nous a vu faire nos premières armes en navigation habitable. Au bout de quelques pas, nous nous arrêtons tous les deux... taraudés par une question. Mais au fait... quel peut bien être le prix de vente du bateau ? N’ayant aucune idée précise si ce n’est une vague notion d’inaccessibilité... Nous retournons donc au stand de Jérôme, nous lui posons la question, il nous communique la fourchette de prix de vente qu’il envisage et nous informe par la même occasion que deux personnes sont intéressées. Nous en prenons bonne note tout en étant étonnés du prix relativement « accessible » ; je crois que dans notre imaginaire nous pensions que c’était plus inabordable. Nous prenons une nouvelle fois congé et nous éloignons à nouveau de son stand.
Nous faisons quelques pas... Nous nous regardons tous les deux, nous nous comprenons sans même besoin de nous parler et nous parvenons à la même conclusion... c’est un rêve accessible ! Nous retournons donc voir Jérôme une troisième fois pour lui dire, cette fois-ci, que nous sommes intéressés pour nous porter acquéreurs du bateau. Il accueille avec bienveillance notre proposition et en navigateur calme et posé, il nous invite à réfléchir à tête reposée et à lui confirmer, d’ici la fin du salon, notre décision en enregistrant toutefois notre option.
La suite est un peu moins précise dans mon esprit tant l’émotion me submerge mais je me souviens que nous décidons de poursuivre notre visite du salon, nous nous arrêtons pour nous restaurer sur place, nous contactons nos quatre filles, j'appele mes grandes filles ou je leur envoye un message (je ne sais plus), j'attends leur réponse qui me parvient quelques minutes plus tard à l'unisson : "Vas-y papa, c'est ton rêve... fonce ! Fais-le ! Et embarque-nous à bord !"... Bref, notre famille, nos amis, tout le monde me dit : il faut le faire ! Il faut réaliser ce rêve et acheter ce bateau. Nous rentrons à la maison, les yeux embués de larmes de joie, submergés d’émotion et le soir même, nous adressons une confirmation écrite de notre offre d’achat.
S’ensuivent quelques jours d’une attente insupportable (je dois avouer ici que la patience n’est, de loin, pas ma qualité première...) et finalement, le 24 décembre au matin, Jérôme. me confirme par écrit l’acceptation de notre offre. Pas mal comme cadeau de Noël, non ? Le temps de rassembler les pièces nécessaires et de convenir d’une date de rendez-vous qui se tiendra le 01/01/2020. La date de signature officielle de la vente interviendra quant à elle tout début février.
C’est donc avec une fierté immense que je clame haut et fort que depuis le premier février 2020, je suis le capitaine (et propriétaire) d’un navire de 35 pieds en me demandant tous les jours si je continue de rêver ou si c’est bien la réalité...
D’où la création de ce site, pour me rappeler chaque jour que tout ceci est bien réel !